Microsoft lance officiellement mercredi dans 190 pays un nouveau Windows, avec lequel il espère faire oublier les erreurs de la version précédente du système d'exploitation et son échec à négocier le virage des smartphones.
La révolution mobile de Microsoft, promise au lancement de Windows 8 fin 2012, n'a pas eu lieu. Consommateurs, entreprises et concepteurs d'applications mobiles ont boudé le logiciel. Et le groupe américain a encore annoncé au début du mois 7.800 suppressions d'emplois, essentiellement dans sa filiale de téléphonie Nokia qui avait déjà supporté une grosse partie des 18.000 coupes décidées l'an dernier lors d'un plan social historique.
Au-delà de la réintroduction symbolique du "menu démarrer", dont la disparition sous Windows 8 avait désarçonné beaucoup d'utilisateurs de longue date, Windows 10 est censé redresser la barre, et équiper un milliard d'appareils d'ici 2018. Toutes versions confondues, Windows compte aujourd'hui 1,5 milliard d'utilisateurs dans le monde, essentiellement sur PC.
Très tard pour le mobile
Contrairement à ses prédécesseurs qui se déclinaient en différentes variantes selon le type d'appareil visé, Windows 10 se veut universel, adapté au PC comme au smartphone en passant par la console de Jeux-vidéo Xbox ou les lunettes de réalité virtuelle.
"L'espoir est d'attirer les développeurs d'application, surtout pour les téléphones où Microsoft a du mal" mais qui sont "toujours stratégiques", estime Rob Enderle, un analyste indépendant du secteur technologique.
Faute d'un catalogue suffisamment convaincant d'applications, les téléphones Windows ne font aujourd'hui pas le poids face à l'iPhone d'Apple ou aux smartphones de multiples marques fonctionnant sous Android, le système d'exploitation de Google.
"Ils sont très loin derrière sur le marché mobile, et ça prendrait énormément d'efforts et de temps, et un vrai changement de pensée des autres acteurs (comme les développeurs) pour que les téléphones Windows gagnent vraiment du terrain", prévient toutefois Steve Kleynhans, un analyste du cabinet Gartner.
Microsoft se montre d'ailleurs "pragmatique" en ouvrant certains produits aux écosystèmes concurrents, avec son application Office pour iPad par exemple, rappelle-t-il.
Autre rupture: Windows 10 aura des mises à jour permanentes et automatiques après l'achat, sans attendre comme aujourd'hui la sortie de la version suivante.
"Tout va en direction de la construction d'une relation" avec le consommateur, avec l'idée de Windows comme "un service permanent qui évolue", estime Frank Gillett, un analyste du cabinet Forrester.
Sang neuf pour le PC ?
Pour accélérer son adoption, Microsoft va également pour la première fois offrir Windows 10 comme une mise à jour gratuite pour les utilisateurs des versions précédentes (Windows 7 et 8). Les fabricants d'ordinateurs continueront eux de payer pour préinstaller le logiciel sur leurs appareils, des licences qui représentent le plus gros des recettes pour le groupe de Redmond.
Pour Steve Kleynhans, un analyste du cabinet Gartner, Microsoft donne aux consommateurs "un échantillon gratuit du nouveau système d'exploitation", en espérant les convaincre d'acheter un nouvel ordinateur.
Le marché mondial du PC, ancrage de Microsoft, est en crise depuis plus de trois ans, cannibalisé par les tablettes et les smartphones. Les ventes ont encore reculé au deuxième trimestre de 9,5% à 11,8%, selon les cabinets Gartner et IDC.
"L'écosystème du PC a été sous pression récemment, mais Windows 10 va élargir nos opportunités économiques", assurait la semaine dernière le patron de Microsoft, Satya Nadella.
Pour Steve Kleynhans, Windows 10 "aura un grand impact sur l'aspect des PC que nous achetons", il devrait "accélérer" la tendance à les doter de fonctionnalités comme l'identification biométrique ou les commandes tactiles, qu'il est prévu pour faire fonctionner tout comme l'assistant vocal Cortana (rival de Siri chez Apple) ou le navigateur Edge (remplaçant d'Internet Explorer).
L'analyste n'attend en revanche "pas d'impact énorme sur les ventes. Les gens remplacent leur PC quand ils ont une raison de le faire. Et Windows 10 à lui seul n'est pas une raison", au moins à court terme. Il note néanmoins que les entreprises, particulièrement réfractaires à Windows 8, seront assez rapidement confrontées à la fin du support technique pour Windows 7, ce qui "augmente la pression pour passer à Windows 10".